Archives de Catégorie: Qu’est-ce que la bibliothérapie ?

« AIMER LIRE : une passion à partager » de Emmanuel Pierrat

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Un prérequis qui me semble essentiel pour pour tirer un maximum de profit des livres dans lesquels nous nous immergeons est bien entendu « l’amour de la lecture ». Comme tout sentiment amoureux, il peut être la conséquence d’un coup de foudre (ce roman m’a tenu en haleine du début à la fin, j’ai adoré, je ne peux plus le quitter…), mais il peut aussi être le fruit d’un travail d’approche à développer chez les plus récalcitrants…

Qui n’a jamais été fasciné par une histoire bien racontée ou par le récit des péripéties de son voisin ? Véhiculées de façon orale ou écrite, les aventures d’autrui restent un pôle d’attraction pour tout un chacun, à condition bien sûr qu’elles puissent capter et retenir l’attention. Les raisons de cet attrait sont multiples, parmi lesquelles celle qui est développée sur ce site, à savoir le moyen le plus facile de trouver de la compagnie et du réconfort dans les mots de son prochain.

Dans son essai « Aimer lire : une passion à partager » paru aux éditions Dumesnil, Emmanuel Pierrat décortique au travers d’anecdotes, de références, citations et réflexions ses dix façons d’aimer la lecture. Sa passion se décline par le biais de la lecture, des livres, de la relecture, des bibliothèques et des librairies, de la lecture à voix haute, du partage des lectures, des livres anciens, des écrivains et finalement de l’écriture… Son texte est fluide et agréable à lire. Nous y retrouvons de nombreuses citations qui font état du pouvoir bienfaisant de la lecture, beaucoup d’entre elles étant issues de bouquins/auteurs déjà présentés sur ce site dans la catégorie «Qu’est-ce que la bibliothérapie ? », comme par exemple Daniel Pennac, Charles Dantzig, Marcel Proust…
Mais je citerai surtout celle de l’auteur lui-même, Emmanuel Pierrat qui dit (page 21) : « Lire aide à mieux connaître les autres, et partant, à mieux se connaître soi-même. Quelle autre création de l’esprit peut-elle, davantage qu’un bon roman, vous tendre un miroir dans lequel vous pourrez suivre jusqu’aux plus subtils méandres de vos émotions ? »
En guise d’exemple illustrant l’apologie de la lecture, Emmanuel Pierrat fait aussi référence au lauréat du meilleur court-métrage d’animation (Oscar 2012) que l’on peut visionner sur youtube en cliquant sur « The fantastic flying Books of Mr Morris Lessmore ».

Comme il est mentionné sur le quatrième de couverture, l’auteur « nous offre un texte où tous ceux qui aiment lire se reconnaîtront »…

A bon entendeur !

 

« Comme un roman » de Daniel Pennac

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« Comme un roman » de Daniel Pennac paru chez folio se présente comme un essai sur la façon de transmettre le bonheur de lire.
Sous la forme d’un manifeste littéraire, Daniel Pennac nous invite à reconsidérer toutes nos bonnes ou mauvaises habitudes en matière de pédagogie pour donner à nos enfants et à nos adolescents l’envie de lire.
Ce petit ouvrage se lit d’une traite et la façon de disséquer ce sujet est loin d’être ennuyeuse. Je le conseille à tous les professeurs de littérature, mais aussi à tous les parents qui ont envie d’inculquer le plaisir de lire à leurs enfants.

Daniel Pennac regrette que notre propension à critiquer et analyser le roman a tendance à fermer les portes à la parole  même du texte et donc à freiner l’envie de s’y introduire. « Plutôt que de laisser l’intelligence du texte parler par notre bouche, nous nous en remettons à notre propre intelligence, et parlons du texte. » regrette-t-il lorsqu’il fait référence à notre façon d’enseigner la littérature p39

Pour lui, « un roman doit être lu comme un roman : étancher d’abord notre soif de récit » p129

L’auteur définit « la vertu paradoxale de la lecture qui est de nous abstraire du monde pour lui trouver un sens » p 19.

Selon lui, « une des fonctions essentielles du conte, et plus vastement, de l’art en général, …est d’imposer une trêve au combat des hommes« p36

ou encore « Une lecture bien menée sauve de tout, y compris de soi-même. Et, par-dessus tout, nous lisons contre la mort. » p91

Finalement l’auteur nous énonce les dix droits imprescriptibles du lecteur qu’il nous exhorte à octroyer à tous les jeunes gens…

1. Le droit de ne pas lire

2. Le droit de sauter des pages

3. Le droit de ne pas finir un livre

4. Le droit de relire

5. Le droit de lire n’importe quoi

6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible)

7. Le droit de lire n’importe où

8. Le droit de grappiller

9. Le droit de lire à haute voix

10. Le droit de nous taire

SAUVEE PAR LES LIVRES « Pourquoi être heureux quand on peut être normal ? » de Jeanette Winterson

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« Pourquoi être heureux quand on peut être normal ? » de Jeanette Winterson paru aux Editions de l’Olivier. C’est la phrase énigmatique qu’assène à la narratrice sa mère adoptive lorsqu’elle lui révèle sa « différence en matière de préférence sexuelle ».

Sous la forme d’une autobiographie vivante et fantaisiste, Jeanette Winterson raconte son enfance et son adolescence en tant que fille adoptée  dans une famille anglaise issue du prolétariat de Manchester. Face à une mère adoptive sévère, acariâtre et qui ne s’aimait guère, elle se réfugie dans la lecture et l’écriture et fait des livres ses plus fidèles compagnons d’infortune. Toujours à la recherche de sa partie manquante, de son identité, elle finira par retrouver les traces de sa mère biologique.

L’auteur fait maintes fois l’éloge de la vertu curative des livres, et surtout de la vertu curative des histoires, des fictions, de la poésie. De ce fait, ce récit s’inscrit complètement dans la théorie des principes de la bibliothérapie tels que je les perçois et tels que j’aimerais vous les communiquer. Mieux qu’un documentaire sur la bibliothérapie, il est un roman autobiographique qui raconte comment les livres ont sauvé la santé mentale d’une personne depuis son enfance jusqu’à aujourd’hui.

Voici quelques extraits de ce roman dont je recommande la lecture à tous ceux qui se sentent seuls et différents :

P18 « Je crois à la fiction et au pouvoir des histoires parce qu’ils nous donnent la possibilité de parler de nouvelles langues. De ne pas être réduits au silence. Nous découvrons tous qu’en cas de traumatisme profond, nous hésitons, nous bégayons ; notre parole est entrecoupée de longues pauses. Le traumatisme nous reste en travers de la gorge. Mais par le language des autres, nous retrouvons le nôtre. Nous pouvons nous tourner vers la poésie. Ouvrir un livre. Quelqu’un a traversé cette épreuve pour nous et s’est immergé profondément dans les mots. »

P57 « La fiction et la poésie sont des médicaments, des remèdes.Elles guérissent l’entaille pratiquée par la réalité sur l’imagination. J’avais été gravement blessée et un pan essentiel de ma personne avait été détruit –c’était ma réalité, les faits de ma vie ; mais l’envers des faits était ce que je pouvais être, ce que je pouvais ressentir et si j’avais les mots, les images et les histoires pour l’exprimer, alors je n’étais pas perdue. »

P79 « Pour moi, les livres sont un foyer. Les livres ne font pas un foyer – ils le sont, dans le sens où de même que vous les ouvrez comme vous ouvrez une porte, vous entrez dedans. A l’intérieur, vous découvrez un temps et un espace différents. Il s’en dégage aussi de la chaleur – comme un âtre. Je m’assois avec un livre et je n’ai plus froid. Je le sais depuis les nuits glacées passées dehors. »

P193 « Et les livres n’avaient pas fini de me sauver. Si la poésie était une bouée de sauvetage, alors les livres étaient des radeaux.»

Mon article à ce sujet sur SAUVEE PAR LES LIVRES | MyBOOX.

« Pourquoi lire ? » de Charles Dantzig

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« Pourquoi lire ? » de Charles Dantzig paru chez Grasset

J’ai apprécié l’ouvrage, sa configuration par chapitre – dans le genre lire pour ceci, lire pour cela, lire ici ou là, lire ainsi etc. – de même que le style grâce auquel il est facile et agréable de suivre cet essai, ainsi que d’adhérer à certaines idées qui y sont développées, mais vers la fin, j’avoue que je me suis un peu lassée, car je pense que Dantzig met un peu trop en avant son élitisme littéraire, montrant bien par là qu’il nage au-dessus du commun des mortels, que ses goûts de lecture sont meilleurs que ceux du simple néophyte et qu’il en sait beaucoup plus long que la plupart des ignares que nous sommes.

Toutefois, je retiens certaines phrases de son ouvrage (et par là même, selon ses dires, je fais vivre ses écrits) qui sont bien tournées et confortent mon opinion sur le fait que la littérature nous aide à nous connaître grâce au processus d’analogie avec les protagonistes d’un récit.
« La littérature, et en particulier la fiction, est une forme d’analogie. Ou plus précisément, une des formes de compréhension par l’analogie. Ou plus précisément, une des formes de compréhension par l’analogie qui agit sur les sentiments en plus de l’intelligence. Analogie, sentiment. Voilà qui est différent de cet autre mode de compréhension qu’est la philosophie, et qui elle, s’appuie sur l’analyse et l’intellect. »

Et même si Dantzig clame haut et fort qu’il n’adhère pas à la phrase de Montesquieu qui disait « Je n’ai jamais eu de chagrin qu’une heure de lecture n’ait dissipé », il n’aborde que partiellement le thème du « lire pour guérir ». Toutefois, certaines phrases laissent clairement sous-entendre qu’il partage l’idée selon laquelle la lecture fait du bien d’une façon ou d’une autre, car elle permet notamment de :
– mettre de l’ordre dans le chaos de notre vie « Tout livre, même de fiction, est un essai, dans la mesure où il cherche à avoir une forme. Dans l’informe de la vie, il prend, rejette et classe, et c’est cette formalisation qui apporte du sens. Le lecteur, face au flasque, lit pour deviner les formes multiples du monde » (p74)
– se conforter dans le fait qu’on n’est pas seul à être moche, bête et méchant « On lit pour voir chez les autres les défauts que nous nous cachons à nous-mêmes » (p81)
– tenter de se connaître et de connaître les autres « On lit pour comprendre le monde, on lit pour se comprendre soi-même » (p24)
– de mettre des mots sur des sentiments difficiles à saisir ou à exprimer « Nous choisissons, dans nos lectures, les vêtements de nos sensations, les paroles de nos bouches muettes, l’éloquence de nos pensées borborygmiques » (p31)

Alors permettez aussi, cher auteur, que chaque lecteur puisse choisir le livre qui lui convient le mieux si celui-ci lui apporte le petit plus qui manque à son existence. Et si « A la recherche du temps perdu » de Marcel Proust se révèle effectivement être du temps perdu pour celui qui a envie de s’évader du quotidien de façon plus légère et plus facile, je ne pense pas qu’un bon polar lui soit particulièrement nocif. Bien au contraire !