Archives de Catégorie: Thème de la DIFFERENCE

Qu’elle soit physique, sociale ou culturelle, la différence nous isole. Ce problème peut être mis en évidence dans une histoire réelle ou fictive

« Célibataire, sans enfants : qui est ta famille ? » Bella DePaulo, Phd

Par défaut

 

CELIBATAIRE, SANS ENFANTS :

QUI EST TA FAMILLE ?

Bella DePaulo, Phd

(traduction française par Nathalie Cailteux)

 

Je vous invite à consulter l’article concernant cet ouvrage

sur le nouveau blog ww.lire-pour-guerir.com

ICI

 

 

Danser la vie sous toutes ses formes…

Par défaut

 

« La salle de bal » de Anna Hope

Traduction par Elodie Leplat – Editions Gallimard (2017) – Editions Folio (2019)

Je me suis plongée dans ce petit bijou littéraire qui remporta le Grand Prix des Lectrices de Elle en 2018. Le souffle romanesque, le cadre historique et l’écriture subtile en font une lecture à la fois captivante et lumineuse.

Résumé de « La salle de bal »

L’histoire se déroule en 1911 au sein de l’asile psychiatrique de Sharston situé dans le Yorkshire (Angleterre). Tous les gens qu’on enferme dans cet asile sont loin d’être des « aliénés mentaux » au sens où nous l’entendons à l’heure actuelle.  La jeune Ella y est internée pour avoir brisé une vitre de la filature où elle travaillait depuis de longues années. Dans la partie réservée aux hommes se trouve John, taxé de « mélancolique » après avoir subi un traumatisme familial. D’autres encore sont là pour diverses raisons, mais dans la plupart des cas, ils sont en pleine possession de leurs facultés mentales.

Charles Fuller a obtenu un poste dans cet asile et y exerce des fonctions de médecin adjoint. A sa grande joie, il a également été nommé chef d’orchestre au sein de l’institut. Tous les vendredis, un bal est organisé dans une grande salle de l’asile où femmes et hommes se retrouvent pour danser au rythme de la musique. Charles considère que la musique ressemble à une « prescription médicale » et prend à coeur son rôle de chef d’orchestre.

« J’ai tendance à préférer Mozart pour les épileptiques. Ou Bach. Les patients semblent apprécier l’ordre que cette musique leur procure et, ensuite… Chopin, Schubert, les Impromptus – pour… ma foi, pour leur… beauté, j’imagine »

Toutefois, le Dr Fuller est également sensibilisé et attiré par les théories de l’eugénisme qui sont en vogue à l’époque, aussi bien dans le monde médical que politique. Ces idées, renforcées par des aspirations ambitieuses personnelles et une certaine amertume, auront de fâcheuses répercussions sur certains patients, notamment Ella et John qui ont noué réciproquement des sentiments amoureux lors de leurs rencontres hebdomadaires dans la salle de bal.

 

Personnages sous l’emprise des idées de leur époque

Le récit alterne selon trois perspectives, celle de Ella, celle de John et celle de Charles (le docteur).

Ella et son amitié pour Clem :

Dans la partie réservée aux femmes, Ella se prend d’amitié pour Clem, une internée issue d’un milieu aisé et qui adore la lecture dans laquelle elle se réfugie littéralement.

« Une fois plongée dans sa lecture, Clem ne relevait jamais la tête : elle disparaissait de manière aussi définitive que si un trou s’était matérialisé et qu’elle s’y était faufilée, et en l’observant, Ella se disait qu’elle aussi aurait bien aimé disparaître. A défaut elle lisait le visage de Clem, en s’imaginant qu’il était possible de deviner la teneur de l’histoire comme ça, à la façon dont Clem se mordillait le bout des ongles ou la peau autour. A sa façon de tourner vite les pages ou de ralentir, les yeux agités d’un mouvement craintif, presque comme si elle ne voulait pas arriver à la fin. »

Or si l’analphabétisme de Ella est un obstacle dans sa relation amoureuse, la passion que Clem dévoile pour les livres lui attire de grosses complications, car elle dérange le docteur qui déclare :

« Contrairement à la musique, il a été démontré que la lecture pratiquée avec excès était dangereuse pour l’esprit féminin. Cela nous a été enseigné lors de nos tout premiers cours magistraux : les cellules masculines sont essentiellement cataboliques – actives et énergiques – tandis que les cellules féminines sont anaboliques – destinées à conserver l’énergie et soutenir la vie. Si un peu de lecture légère ne porte pas à conséquence, en revanche une dépression nerveuse s’ensuit quand la femme va à l’encontre de sa nature. »

Ces déclarations misogynes, hélas en phase avec certaines pensées de l’époque, auront des conséquences désastreuses sur Clem lorsque celle-ci se verra privée de ses livres.

 

John Mulligan :

John est un bel Irlandais qui attire l’attention du docteur d’une façon qui trouble ce dernier.

C’est grâce à sa rencontre avec Ella que John sortira de sa torpeur mélancolique. Les lettres qu’il adresse à sa bien-aimée nous le révèlent comme un être sensible et touchant.

 

Charles :

La romance entre Ella et John place le docteur Fuller et ses idées tordues dans la partie ombragée de l’histoire. L’auteure Anna Hope parvient toutefois à éviter tout manichéisme en faisant ressortir le côté tragique du personnage emprisonné dans des émotions qu’il ne maîtrise pas et qui le conduiront à adopter les idées eugéniques de son époque.

Docteur pour « aliénés mentaux » qui ne le sont pas, Charles se révèle lui-même comme un « aliéné » en société.

Séduit par les théories eugéniques (dont la stérilisation des indigents en devenait un instrument), Charles tente d’améliorer cette société en voulant les mettre à l’oeuvre au sein de l’asile. Son cheminement, bien que funeste et critiquable, suit une logique en phase avec les idées de Sir Francis Galton, cousin de Charles Darwin.

Ambitieux, Charles souhaite ainsi se faire remarquer par les grands de l’époque qui les cautionnent (parmi lesquels Winston Churchill).

 

Rôle lumineux de la nature

La nature détient le rôle primordial de l’espoir dans cette histoire. La nature illumine les coins sombres de l’asile. En lisant ce roman, on a envie de sortir hors de l’enceinte anxiogène de l’asile et de respirer une grande bouffée d’air frais.

[John] « Il se mit à remarquer les choses plus en détail : l’éclat des feuilles nouvelles du vieux chêne, la façon dont les hirondelles voletaient dans le soleil, plus sûres maintenant, comme si elles s’en glorifiaient, le jabot scintillant tel de l’argent lorsqu’elles tournoyaient, serpentin de lumière.
Il ne semblait pas juste qu’il pût voir ces choses alors qu’elle, et les autres femmes, non.
Ainsi donc il se mit à emmagasiner les images qu’il voyait de façon à avoir quelque chose à lui dire le vendredi, dans la salle de bal, quelque chose qu’il déroberait au monde lumineux pour l’introduire discrètement dans les couloirs obscurs. »

Roman bienfaisant ?

Anna Hope, actrice et écrivaine anglaise, s’est inspirée de son histoire familiale (son arrière-grand-père avait été interné dans un asile britannique), ainsi que de la Grande Histoire pour dérouler le fil de ce récit puissant et aux accents dramatiques bien agencés. L’enfermement des indigents et pauvres gens dans les asiles, ainsi que les principes de l’eugénisme tels qu’ils étaient en vogue au début du XXe siècle nous sont expliqués par le biais du docteur Fuller et suscitent notre réflexion. Le dénouement du récit contredira ici les théories suivies par Charles.

Hélas, les germes de ces idées – générées en partie, une fois de plus, par la peur de la différence – se retrouveront imbriqués dans les ressorts funestes de la grande tragédie humaine qui surviendra quelques années plus tard en Europe…

P.S. N’oublions pas que notre société contemporaine n’est pas non plus étrangère à ce débat, où la morale se heurte souvent aux moyens utilisés pour parvenir à une « humanité mieux adaptée et donc plus heureuse ».

 

« La salle de bal » de Anna Hope est un roman bienfaisant parce qu’il nous fait réfléchir sur des questions ou idées dont il faut coûte que coûte éviter les fâcheuses dérives. Mais le récit donne aussi du baume au coeur parce qu’il met en évidence le côté lumineux des sentiments amoureux, de l’amitié et de l’espoir, dont la nature représente ici la métaphore par excellence.

« Aux frontières de la norme » entretien avec l’autrice

Par défaut

J’ai le plaisir de vous annoncer que le recueil de nouvelles

« Aux frontières de la norme » de Céline Dominik Wicker

a été selectionné dans la catégorie « Nouvelles »

du premier trimestre 2020 pour le Prix Bob Morane !

 

Lire pour guérir

Aux frontières de la norme de Céline Dominik Wicker

« Aux frontières de la norme »

Céline Dominik Wicker

(Editions du Venasque)

Recueil de nouvelles militant pour le droit à la différence

L’auteure – ou autrice – franco-suisse Céline Dominik Wicker, maman de deux enfants autistes, a rédigé le recueil de nouvelles « Aux frontières de la norme » publié par les éditions du Venasque. Sur sa page Facebook , Céline nous explique sa passion pour l’écriture et son combat pour une société « plus inclusive ».

Les cinq nouvelles qui forment ce percutant recueil dans un fabuleux mélange de réalisme et de fantaisie forcent la réflexion sur ce qui devrait être considéré comme « normal » dans notre société.

J’ai eu le plaisir d’interviewer Céline qui a bien voulu répondre à mes questions au sujet de son recueil :

  • Pouvez-vous nous expliquer le fil rouge qui relie ces cinq nouvelles et la raison qui vous a poussée à les écrire ?

Ce recueil s’inscrit…

Voir l’article original 949 mots de plus

« Aux frontières de la norme » entretien avec l’autrice

Par défaut

Aux frontières de la norme de Céline Dominik Wicker

« Aux frontières de la norme »

Céline Dominik Wicker

(Editions du Venasque)

Recueil de nouvelles militant pour le droit à la différence

L’auteure – ou autrice – franco-suisse Céline Dominik Wicker, maman de deux enfants autistes, a rédigé le recueil de nouvelles « Aux frontières de la norme » publié par les éditions du Venasque. Sur sa page Facebook , Céline nous explique sa passion pour l’écriture et son combat pour une société « plus inclusive ».

Les cinq nouvelles qui forment ce percutant recueil dans un fabuleux mélange de réalisme et de fantaisie forcent la réflexion sur ce qui devrait être considéré comme « normal » dans notre société.

J’ai eu le plaisir d’interviewer Céline qui a bien voulu répondre à mes questions au sujet de son recueil :

 

 

  • Pouvez-vous nous expliquer le fil rouge qui relie ces cinq nouvelles et la raison qui vous a poussée à les écrire ?

Ce recueil s’inscrit, d’une certaine manière, dans une démarche cynique, au sens philosophique du terme, en s’attaquant à notre mauvaise foi et aux illusions qui nous construisent.

La déconstruction cynique nous invite, avec désinvolture et humilité (les caractéristiques propres du cynique selon Antisthène), à nous défaire de tout ce qui nous empêche à parvenir à une véritable conscience de soi. Le plus drôle, peut-être, est que j’use de fictions pour mettre à jour les fictions qui constituent les assises de notre réalité.

Quant à la raison qui m’a poussée à écrire ces nouvelles, je dirais que c’est une sorte de compulsion, un besoin viscéral de traduire en mots ce qui m’émeut, ce qui me met en colère, ce que j’ai envie de crier.

  • Je me trompe peut-être, mais j’ai trouvé que la première nouvelle « Ressemblance » se différenciait par rapport aux autres, même si d’une certaine façon, la vie des protagonistes est frappée d’une sorte d’ « anomalie ». Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

« Ressemblance » se différencie par son ton, il est vrai, car le narrateur qui prend plaisir à faire rimer sa prose ci et là, tel le mièvre romantique pour qui il se prend, cherche à convaincre son lecteur (et lui-même) de la vraisemblance du personnage qu’il s’est construit. Toutefois, au-delà de l’image factice qu’il nous renvoie, la démarche qui sous-tend l’écriture de la nouvelle reste la même que pour les autres : il y est toujours question du dépouillement de nos illusions, de nos bovarysmes. Et si tout ce qui est construit est illusoire (cela peut paraître évident mais cela s’oublie aussi facilement), alors il n’y a plus ni normalité ni anomalie. La frontière séparant l’entre soi de l’Autre est poreuse, voire inexistante.

  • L’un de vos protagonistes décrète en parlant des civilisations humaines : « la seule logique qui vaille et que vous avez toujours éludée est celle qui assure l’avenir de son espèce » ou encore « vous avez abdiqué votre humanité au profit de la rentabilité ». Ce discours fait, me semble-t-il, écho aux paroles que l’on entend de plus en plus dans les médias selon lesquelles nous courons à notre perte si nous continuons la surconsommation et la surexploitation de nos richesses écologiques, et ceci pour le bien-être égoïste d’un petit nombre aux dépens du reste de l’humanité. Etes-vous d’accord avec cette analyse ?

Oui, tout à fait. La rentabilité est une de ces croyances illusoires à la base de notre société. Elle n’a de réalité que celle qu’on veut bien lui donner et il serait temps d’en revoir la pertinence, surtout dans un monde aux ressources finies. Que voulons-nous privilégier, l’obsolescence de notre pacotille ou notre propre survie ?

  • Vous dénoncez l’immobilisme de la société qui pense pourtant qu’elle agit pour le bien des personnes autistes ou autres personnes « hors norme ».   Comment la société peut-elle remédier à ses lacunes  d’après vous ?

On dit que l’enfer est pavé de bonnes intentions, n’est-ce pas ? C’est aussi le cas pour la (mauvaise) gestion de l’autisme (et des autres handicaps et/ou neurodiversités) en France. On est encore affectés par une pensée délétère qui est de ségréguer les personnes « hors normes » – pour leur bien, ajoute-t-on comme pour se dédouaner. Il est difficile de venir à bout d’une telle pensée et, pourtant, il faudra bien le faire si l’on souhaite mettre en place une société véritablement inclusive. Cela demande un changement de paradigme qui n’a pas encore eu lieu. Tout commence d’abord dans la tête. Une fois que nos mentalités auront changé, on s’étonnera même qu’il y ait eu une époque où l’on parquait la Différence. Les autistes ont des droits, comme les autres, et leurs familles ne devraient pas avoir à les revendiquer tout le temps. Imaginez-vous une situation similaire où vous devriez justifier, sans arrêt, du bien-fondé d’inscrire votre enfant neurotypique dans une école standard, à plein temps ? Cela paraîtrait ubuesque, non ? Eh bien, c’est justement le quotidien de milliers de parents d’enfants différents. Pour que les choses se passent au mieux, nous dépendons surtout de la bonne volonté de personnes bienveillantes et lorsque ces dernières ne sont pas au rendez-vous, tout risque de s’écrouler comme un château de cartes. Ce n’est ni légitime, ni juste. Les personnes neuro-atypiques ne devraient pas payer les pots cassés d’un système défaillant. Il serait donc grand temps de prendre enfin en compte et de mettre en application les recommandations de l’experte de l’ONU, Mme Catalina Devandas-Aguilar, venue en France en janvier 2017. Cela fait déjà presque deux ans. Qu’est-ce qu’on attend ?

  • Gardez-vous malgré tout l’espoir en un avenir meilleur et en la capacité d’empathie de l’être humain ? Si oui, dites-nous ce qui vous motive à penser que tout espoir n’est pas perdu.

Oui, bien sûr, sinon je n’écrirais pas. Je pense que l’empathie est inhérente à notre condition humaine. Seulement, parfois, on l’oublie. Aussi, la culture, que cela soit par le biais d’un film, d’une lecture, d’un témoignage, etc. nous aide à nous mettre à la place de l’Autre et à ressentir ses peines, ses joies par procuration. Je considère donc ce recueil comme un trait d’union entre mes lecteurs et moi.

Je remercie Céline pour ses réponses détaillées et vous invite à consulter les sites Ricochet et Babelio  pour toute information complémentaire.

 

Nouvelles bienfaisantes ?

Nos rapports à autrui font partie intégrante de notre vie et en constituent l’une des parties les plus essentielles. Il est indispensable de dépasser les limites de notre zone de confort, de notre propre « normalité » réductrice pour s’ouvrir à l’espace vital d’autrui. C’est seulement grâce à cette ouverture que nous pourrons vivre en accord avec l’essence même de notre humanité qui est la compréhension et l’amour de l’être vivant dans toute sa diversité.

 

Maladies et handicaps : ces lectures qui les racontent

Par défaut

Lectures sur maladies et handicaps

Romans sur la maladie et le handicap

Plusieurs d’entre vous m’ont demandé de leur suggérer des romans sur la maladie ou le handicap, des histoires ou récits de vie dont la lecture pourrait les sortir de leur isolement face à la souffrance ou au sentiment de différence vis-à-vis d’autrui.

Voici une petite liste, bien entendu non exhaustive, de romans susceptibles de soulager mentalement une douleur :

Cancer et souffrance

« La Mort d’un apiculteur » de Lars Gustafsson

Au travers des carnets de note d’un ancien instituteur de campagne se livre le récit de celui qui se croit condamné à une mort prochaine parce qu’il est atteint du cancer. Il ne souhaite toutefois pas se faire soigner en milieu hospitalier et préfère rester avec son chien et ses abeilles pour goûter les derniers instants de vie et livrer bataille à la douleur. Roman bouleversant pour comprendre comment survivre à la douleur aussi atroce soit elle.

« Née sous les étoiles » de Nathanaëlle Arginthe

L’histoire vraie d’une fillette atteinte de cancer qui s’est battue courageusement contre la maladie pour finalement devenir médecin elle-même.

« La Mélodie des jours » de Lorraine Fouchet 

La vie de Lucie bascule lorsqu’elle apprend qu’elle a le cancer du sein. Pourtant tout n’est pas perdu, bien au contraire, cette maladie lui ouvrira d’autres horizons et lui fera connaître des personnes très attachantes. Vous trouverez plus d’informations à ce sujet dans une chronique précédente sur ce roman ici.

Réflexions autour du SIDA

« A l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie » de Hervé Guibert 

« Le protocole compassionnel » de Hervé Guibert

« L’homme au chapeau rouge » de Hervé Guibert 

Trois tomes d’une trilogie sur le sida. L’auteur est passé maître de l’autofiction, un genre défini sur Wikipedia comme le  « croisement entre un récit réel de la vie de l’auteur et un récit fictif explorant une expérience vécue par celui-ci » .

Hervé Guibert y raconte l’irruption de la maladie dans sa vie personnelle et dans celle de ses proches, ainsi que toutes les conséquences physiques et mentales qui s’en sont suivies à une époque où le sida faisait encore de nombreuses victimes.

Handicaps physiques et différences visibles

« L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux » de Nicholas Evans 

Ce récit nous raconte comment une jeune fille a perdu sa jambe dans un accident et comment elle reprend malgré tout goût à la vie.

« Wonder » de R.J. Palacio

L’histoire d’un enfant victime d’une malformation faciale qui doit affronter les autres et sa différence.

« L’art d’écouter les battements de coeur » de Jan-Philipp Sendker

L’histoire remplie d’espoir  à propos de laquelle vous trouverez une chronique précédente en cliquant ici.  Le récit parle de la rencontre de deux êtres qui souffrent d’un handicap physique.

Expérience de paralysie

« Palladium » de Boris Razon

L’auteur est victime du syndrome de Guillain-Barré, une maladie auto-immune du système nerveux, ayant entraîné sa paralysie totale pendant plus d’un mois. Il nous raconte cette expérience brutale dans son roman.

« Le Scaphandre et le papillon » de Jean-Dominique Bauby

Paralysie totale aussi pour l’auteur de ce roman qu’un accident vasculaire plonge brutalement dans le coma. Lorsqu’il en ressort, seul son esprit est encore vivant.  De son corps inerte, le clignement de son oeil gauche lui permettra de communiquer avec le monde. Grâce au mouvement calculé de cet oeil, il parviendra à faire écrire ce roman qui témoigne de cette expérience traumatisante.

Difficultés à vivre avec le diabète

« Dame Langouste » de Amélie Schoendoerffer

Témoignage d’une jeune fille née dans une famille de stars et souffrant de la maladie du diabète. Elle nous livre son expérience d’adolescente en proie avec les affres de la maladie et de son jeune âge, alors qu’elle souhaite seulement vivre « normalement ».

Cécité

« Soleil Noir » de Marie-José Auderset et Claude Lonfat

L’auteur a perdu la vue des suites d’une maladie génétique. Ses deux fils tentent de lui redonner goût à la vie. L’un des deux mourra et l’autre devra affronter la maladie. A son tour, le père aveugle veut rendre hommage à ses fils en écrivant ce roman par l’intermédiaire de la journaliste Marie-José Auderset. Récit bouleversant et plein de courage.

Autisme

« L’Empereur, c’est moi » de Hugo Horiot

En quelques pages, l’auteur nous raconte la souffrance qu’il a vécue comme enfant autiste Asperger. Il se replonge dans les pensées de ses jeunes années (quatre, huit, douze ans) lorsqu’il refusait de parler et se comportait d’une façon qu’autrui considérait comme « étrange », « différente ». Plus d’informations à propos de ce livre dans une chronique précédente que vous trouverez ici.

***

La plupart de ces romans témoignent d’expériences vécues par leur auteur ou par une personne de son entourage. L’authenticité des émotions et des pensées est bien présente, mais qui plus est, le vent de l’espoir souffle sur les mots,  un espoir non pas de guérir, mais de vivre heureux malgré la maladie ou le handicap.

J’espère que ces quelques pistes de lectures vous permettront de trouver un peu de réconfort. Si d’autres romans vous ont aidé(e)s ou ont aidé des proches souffrant d’une maladie ou d’un handicap, n’hésitez pas à m’envoyer une note que je publierai volontiers dans les commentaires ci-dessous.

Une excellente semaine !!!

 

Soi-même – entre l’un et l’autre

Par défaut

Roman "Désorientale" Négar Djavadi

« Désorientale » de Negar Djavadi

Editions Liana Levi 2016 

 

Roman coup de coeur qui mérite bien les différents prix dont il est le lauréat (Prix de l’Autre Monde 2016 – Prix du Style 2016 – Prix Emmanuel-Roblès 2017 – Prix Première 2017 – Prix littéraire de la Porte Dorée 2017 – Prix du Roman News 2017) !

L’auteure Negar Djavadi nous plonge dans l’histoire contemporaine de son pays, l’Iran, au travers du prisme d’une saga familiale, depuis son ancêtre féodal jusqu’à la narratrice, Kimiâ, que le lecteur retrouve dès la première page dans la salle d’attente de l’hôpital Cochin à Paris, et plus exactement au service de PMA (Procréation Médicalement Assistée).

Récit de mémoire, non linéaire et foisonnant

Le récit n’est pas une histoire chronologique de faits, mais se lit en suivant les digressions opérées par la mémoire et les souvenirs de la narratrice qui patiente en attendant sa visite chez son médecin. A la manière d’un conte persan où chaque anecdote s’ouvre sur une autre et se réinvente au gré des conteurs, la narratrice retrace le parcours de sa famille durant le 20e siècle en Iran. Plus particulièrement, elle relate celui de ses parents, opposants politiques à la fois au régime du Shah et à celui de Khomeiny, et qui ont été obligés de s’exiler en France avec leurs trois filles pour survivre.

Lorsqu’on demande à Negar Djavadi quel est le livre qui a changé sa vie dans une interview proposée sur YouTube par La Grande Librairie, elle cite le roman de Salman Rushdie « Les Enfants de Minuit » . Grâce à ce roman baroque et picaresque, elle a appris qu’on pouvait écrire autrement qu’en recourant à la façon linéaire de raconter des histoires. Elle s’en est inspirée pour écrire « Désorientale », un roman sur la mémoire orientale.

« Mais la vérité de la mémoire est singulière n’est-ce pas ? La mémoire sélectionne, élimine, exagère, minimise, glorifie, dénigre. Elle façonne sa propre version des événements, livre sa propre réalité. Hétérogène, mais cohérente. Imparfaite, mais sincère. »

Récit empreint de faits réels, mais non autobiographique

Il ne s’agit pas ici d’un témoignage relatant la vie de l’auteure. Ce n’est donc pas à proprement parler un récit autobiographique. Toutefois, ce roman s’inspire de plusieurs épisodes de sa propre vie : les parents de Negar Djavadi étaient également opposants aux régimes du Shah et de Khomeiny, et tout comme la narratrice Kimiâ, la romancière a dû fuir l’Iran à l’âge de 11 ans avec sa mère et sa soeur à travers les montagnes du Kurdistan pour rejoindre la France.

En outre, le roman retrace des faits marquants de l’histoire de l’Iran au 20e siècle, avec mention des dates et événements clefs. Il nous ouvre d’ailleurs les portes sur une vision de l’histoire de ce pays assez différente de celle relativement tronquée qui nous est rapportée en Europe.

Par exemple, l’évocation de l’époque encore féodale dans laquelle vivait l’arrière-grand-père de la narratrice rejoint une réalité méconnue. L’ancêtre – portant le nom assez comique de Montazemolmolk – vivait avec un harem d’une cinquantaine de femmes au début du 20e siècle !

Identité double ou trouble ?

Sara, la mère de la narratrice, était férue de culture française. Dès leur plus jeune âge, Kimiâ et ses soeurs ont suivi des cours de français. Leur exil en France ne s’apparente pas à un plongeon glacial dans une langue et culture totalement étrangères. Mais malgré tout, elles sont obligées de faire le deuil de leur appartenance persane et iranienne pour adopter une nouvelle vision, celle de l’Europe et de la France. C’est ce que l’auteure appelle la « désintégration », à savoir le chemin suivi par les personnes exilées qui doivent d’abord quitter peu à peu leurs repères culturels pour faire de la place à de nouveaux repères.

« Je suis devenue, comme sans doute tous ceux qui ont quitté leur pays, une autre. Un être qui s’est traduit dans d’autres codes culturels. D’abord pour survivre, puis pour dépasser la survie et se forger un avenir. Et comme il est généralement admis que quelque chose se perd dans la traduction, il n’est pas surprenant que nous ayons désappris, du moins partiellement, ce que nous étions, pour faire de la place à ce que nous sommes devenus. »

« Bientôt, mon prénom ne sera plus prononcé de la même manière, le « â » final deviendra « a » dans les bouches occidentales, se fermant pour toujours. Bientôt, je serai une « désorientale ». »

En raison de son appartenance aux deux cultures et également en raison de son homosexualité qui font d’elle un « être à part » dans les deux camps, la narratrice observe à distance les deux identités culturelles qui la définissent; elle les compare et voit la part sombre et la part lumineuse de chacune d’elles.

Elle identifie notamment les points communs comme l’importance de la maternité et une certaine incompréhension vis-à-vis de l’homosexualité, mais aussi par exemple la façon dont les sociétés écrasent la révolte de leur population respective, en les soumettant habilement au phénomène de l’attente : les gens attendent devant les administrations pour obtenir un visa, mais ils attendent aussi des nuits entières pour obtenir des tickets, le dernier smartphone etc. Ailleurs ils attendent la fin d’une guerre qui ravage leur pays.

Roman bienfaisant ?

A plus d’un titre, je recommande ce roman qui ouvre le débat sur la tolérance envers les étrangers, mais aussi et surtout envers tous ceux qui sont différents de la soi-disant « norme » dans leur façon de parler, de raconter, d’aimer, de fonder une famille, mais aussi d’écrire la petite et la grande histoire.

L’oeuvre regorge de personnages à la fois vibrants de sincérité et hauts en couleurs : j’ai déjà évoqué l’ancêtre, mais il ne faut pas oublier les autres membres de la famille, à commencer par les parents révolutionnaires de la narratrice, Sara et Darius, ainsi que la fratrie paternelle désignée par Oncle Numéro Un, Oncle Numéro Deux, etc., qui malgré cette désignation commune fait référence à des êtres ayant des personnalités propres et bien distinctes les unes des autres.

Le thème de l’identité est bien à l’oeuvre dans ce beau roman, questionné de toutes parts et évoqué de diverses manières. Car la question identitaire ne se pose pas seulement entre nations très éloignées d’un point de vue géographique. On retrouve ce thème aussi dans les différences, même mineures, entre pays voisins. La narratrice nous fait part d’observations très pertinentes à propos des Belges, des Néerlandais qui m’ont beaucoup amusée.

Par ailleurs, la question identitaire prend aussi sa place dans la façon dont nous nous positionnons au sein de la famille face à la maternité, à la vie de couple.

Il est évident qu’adopter des positions différentes ou étranges peuvent attirer des ennuis. Le fait d’aller au-delà de ce qui nous définit dans une identité prédéfinie pour en adopter ou se rapprocher d’une autre constitue toujours un risque ….qu’il est pourtant vital de courir pour éviter de mourir d’ennui…

« On a la vie de ses risques. Si on ne prend pas de risques, on subit. Et si on subit, on meurt, ne serait-ce que d’ennui. » (citation de la grand-mère de Kimiâ)

 

Le choix d’être mère ou non

Par défaut

Et toi tu t'y mets quand ? Myriam Levain

« Et toi tu t’y mets quand ? » Myriam Levain

Editions Flammarion, 2018

Cet ouvrage autobiographique soulève les questions et problèmes rencontrés par les femmes

qui souhaitent s’affranchir des normes imposées par la société en matière de procréation et de maternité.

 

S’affranchir du modèle idéal

Myriam Levain nous raconte son propre parcours médicalisé, tout en mettant en lumière ses questions et celles d’autres femmes face au regard implacable d’une société qui voudrait leur imposer un modèle idéal.

« Nous sommes toutes deux d’accord sur le fait que les modèles féminins qui nous sont montrés depuis l’enfance sont toujours ceux de femmes ayant eu des enfants, comme si notre destin à toutes était inéluctablement d’être enceintes un jour.« 

Souhaitant s’accorder une chance de pouvoir un jour enfanter, la journaliste, qui n’a pas encore eu l’opportunité de devenir mère à 35 ans, décide de congeler ses ovocytes afin de préserver sa fertilité.

Son roman est étoffé de nombreux témoignages qui dévoilent au grand jour un problème trop rarement débattu sur le devant de la scène, à savoir celui de la liberté et du choix féminin en matière de procréation.

 

S’affranchir de l’horloge biologique

« A 20 ans, je répondais que je voulais des enfants, mais plus tard, quand je serais adulte. A 25 ans, je répondais que je voulais des enfants, mais plus tard, quand j’aurais un vrai boulot. A 30 ans, je répondais que je voulais des enfants, mais plus tard, quand j’aurais rencontré le bon mec.
Aujourd’hui, j’ai 35 ans et plus tard, c’est maintenant. »

A l’heure actuelle, les avancées de la médecine permettent de prélever et de congeler des ovocytes lorsque ceux-ci sont encore suffisamment sains pour aboutir à une potentielle grossesse. En effet, à partir de 35 ans, le taux de fertilité d’une femme décline sensiblement.

Dès lors, si pour un tas de raisons qui lui sont propres, une femme décide de retarder le moment de se consacrer à une grossesse et à l’éducation de futurs enfants, elle devrait pouvoir disposer librement de l’opportunité de s’affranchir de son horloge biologique grâce à la médecine….

 

Une démarche médicale pas toujours autorisée

Cependant, la procédure médicale permettant le prélèvement et la congélation des ovocytes n’est pas encore autorisée en France pour les femmes lesbiennes ou les femmes célibataires qui souhaitent  s’accorder un délai supplémentaire avant de donner la vie. Ces femmes doivent donc faire appel à des services pratiqués à l’étranger, comme l’a fait Myriam Levain.

A cette exigence particulièrement pénible pour la population féminine française s’ajoutent toutes les contraintes médicales inhérentes à la procédure, parmi lesquelles une disponibilité à toute épreuve durant un laps de temps déterminé. Le prélèvement d’ovocytes reste une démarche pénible physiquement et mentalement dont la charge est un peu allégée lorsque la loi l’autorise à l’intérieur du pays.

 

Regard de la société

Extrait du roman de Myriam Levain "Et toi tu t'y mets quand ?"

 

Reste à se libérer du regard de la société, ce qui constitue souvent l’une des épreuves les plus difficiles dans une démarche de procréation médicalement assistée, d’autant plus si le pays dans lequel tu vis ne reconnaît pas à la femme le droit de pouvoir décider du moment où elle souhaite enfanter.

 

Avec son roman, Myriam Levain plaide en faveur du droit des femmes de pouvoir disposer librement de leur corps en matière de procréation médicalement assistée, et ceci quelle que soit leur situation maritale ou familiale.

 

Se différencier des normes du genre

 « Plus facile à dire qu’à faire, surtout quand le regard des autres leur rappelle constamment qu’elles n’ont toujours pas coché la case « maman » bien qu’elles aient validé toutes les autres.« 

Prendre une décision qui va à l’encontre de tous les modèles sociaux n’est pas chose facile. Décider d’être mère à quarante ans, vouloir s’engager pleinement dans sa carrière professionnelle et y prendre plaisir avant d’envisager toute future grossesse, voire décider ne pas avoir d’enfants du tout représentent des choix qui ne sont pas encore bien perçus en société, d’autant plus si la société continue de faire peser la grosse partie de la charge parentale sur la mère.

Dans ce contexte, Myriam Levain remet aussi en cause l’égalité hommes-femmes :

« J’ai soudain le sentiment que je vais pouvoir emprunter à mon rythme le chemin de la maternité, quitte à ne jamais l’emprunter du tout :
je ne suis sûre de rien, mais je veux me laisser toutes les possibilités ouvertes.
Exactement comme mes amis hommes pas encore papas« 

 

Conclusion : roman bienfaisant ?

Un ouvrage autobiographique féminin dévoilant un problème qui touche de plus en plus de femmes constitue un véritable soulagement pour celles qui sont confrontées à toutes les questions de procréation à un âge plus avancé que la « normale », mais également à toutes les questions de maternité dans un sens beaucoup plus large.

Myriam Levain nous fait part de son expérience lorsqu’elle décide de s’accorder une chance supplémentaire de pouvoir enfanter un jour. Cette expérience l’a conduite à élargir le débat sur toutes les réflexions concernant le droit pour les femmes de choisir sa place dans la société en tant que mère ou en tant que femme sans enfant.

Il est en effet impératif que change le regard de la société face aux femmes qui ont décidé de ne pas donner naissance à un bébé ou de le faire à un moment plus opportun pour elles, mais qui ne correspond pas forcément aux normes idéales.

Voici en guise de conclusion une petite vidéo sur le roman par Myriam Levain :

 

Le souffle des questions identitaires à travers un roman puissant

Par défaut

« L’Art de perdre »

Alice Zeniter

Editions Flammarion (2017)

 

Lauréat du prix Goncourt des Lycéens en 2017, ce volumineux roman retrace sur trois générations le parcours d’une famille algérienne kabyle.  Naïma, la narratrice remonte le fil de ce récit depuis les années 1930. A cette époque, son grand-père Ali fait fortune avec ses deux frères dans la production d’huile d’olive grâce à la découverte inattendue d’un pressoir.

Les événements historiques mettront peu à peu un terme à la prospérité familiale. Soupçonnée de faire partie de ce que l’on nomme les « harkis » – à savoir les traîtres à la solde de l’armée française – une partie de la famille se verra condamnée à fuir l’Algérie après l’indépendance.

Hamid, le fils aîné de Ali et père de Naïma, découvrira dans son enfance la vie miséreuse des camps qui furent aménagés en France pour les Algériens.  Finalement placée dans une cité H.L.M., la famille tentera de s’adapter à sa nouvelle situation en faisant face à la montée du racisme.

Naïma qui n’a connu que la France, terre d’accueil de sa famille, se heurte au silence de ses parents lorsqu’elle essaie de remonter le fil de son histoire. Elle voudrait se sentir française tout en revendiquant ses racines algériennes. Mais les attentats perpétrés durant la dernière décennie restent encore autant d’obstacles à l’intégration définitive des siens.

A-t-elle définitivement perdu l’Algérie, ce pays qu’elle ne connaît pas et dont elle ne maîtrise ni la langue ni les coutumes ?

Le titre  assez énigmatique « L’Art de perdre » s’inspire d’un poème d’Elizabeth Bishop selon lequel la vie est un apprentissage de la perte à tous les niveaux; il faut pouvoir apprendre à perdre ses clés, sa maison, son pays …

Roman bienfaisant ?

Cette fresque romanesque évoque avec justesse les difficultés liées à l’intégration dans une perspective intimiste qui parlera à beaucoup de monde. Le récit nous rappelle, ou nous fait connaître, les ressentis et les non-dits d’une famille fuyant son pays, génération après génération.

Alice Zeniter dénonce l’emploi des étiquettes comme « harki » ou « musulman ». Dans l’interview ci-après, elle nous confie que l’emploi d’une étiquette peut amputer quelqu’un de toute l’ampleur d’une vie. Parce qu’Ali a combattu pendant la seconde guerre mondiale pour les Français et parce qu’il a dû faire un choix à un moment donné durant la guerre en Algérie, il est taxé de « harki », ce qui entraînera des conséquences irréversibles pour lui et sa descendance.

Je vous recommande ce beau roman, car il éveille les consciences et appelle à la compréhension et à la tolérance. En plus d’être bien écrit et bien documenté au niveau historique, il s’inscrit dans des problématiques actuelles autour de la question identitaire. N’hésitez pas non plus à écouter l’auteur en parler dans l’interview de l’émission La Grande Librairie.

 

 

Difficile de parler du sentiment amoureux

Par défaut

« Le dernier amour d’Attila Kiss » de Julia Kerninon

Editions du Rouergue, 2016

« Le Meilleur des amis » de Sean Rose

Editions Actes Sud, 2017

 

Finalistes du Prix Horizon 2008 récompensant tous les deux ans le meilleur second roman d’un jeune auteur, « Le dernier amour d’Attila Kiss » de Julia Kerninon et « Le Meilleur des amis » de Sean Rose décortiquent tous les deux le thème de l’amour avec force ellipses qui révèlent la qualité flottante et le caractère difficilement descriptible des émotions amoureuses.

Julia Kerninon dévoile les balbutiements d’un rapport amoureux entre un homme d’une cinquantaine d’années issu d’un milieu pauvre de Hongrie et une jeune Autrichienne, fille d’aristocrate. L’auteur évoque l’art de l’amour comme un art de guerre où les parties dévoilent peu à peu leurs stratégies . En toile de fond se démarquent les différences sociales (riche – pauvre) et les différences culturelles (Autriche-Hongrie) qui séparent les protagonistes.

Les différences culturelles apparaissent aussi dans « Le Meilleur des amis », car le narrateur est de mère asiatique et exilée. D’une certaine façon, il trouve le réconfort de sa différence dans l’amitié, et ensuite dans l’amour qu’il entretient avec la promise de son meilleur ami. Amitié, amour et trahison rythment ce récit dont le point de départ est un rendez-vous tardif dans un château bordelais où affluent les souvenirs qui en construisent petit à petit la trame.

 

Romans bienfaisants ?

Le printemps qui nous arrive enfin se décline comme la saison des amours...

Bien que le sentiment amoureux reste difficile à raconter, force est de constater que ces deux auteurs parviennent, chacun avec leur talent propre, à nous en décrire des aspects familiers.

Sean Rose met en scène un décor qui fluctue dans l’espace et dans le temps comme une métaphore des vibrations amoureuses et sentimentales qui traversent l’existence.

La toile de fond historique entre l’Autriche et la Hongrie tissée par Julia Kerninon est prétexte à décrire l’ambivalence de toute relation intime qui se construit.

 

 

 

Ces histoires courtes et magnifiquement tournées mettent des mots sur des émotions amoureuses souvent difficiles à comprendre, à décrire, à vivre. Le décryptage et la reconnaissance de tels sentiments procèdent du caractère bienfaisant de ces lectures.

 

Se reconstruire suite à des blessures familiales…

Par défaut

 

« DELIVRANCES » de Toni Morrison

« God Help the Child » Trad. française par Christine Laferrière

Ed. Christian Bourgeois (2015) – Audiolib (2016)

 

La grande romancière afro-américaine, Toni Morrison (née en 1931 !) a écrit une histoire qui aborde de façon condensée ses thèmes fétiches : le racisme envers les gens de couleur aux USA, l’enfance et la famille, le mal-être et la renaissance grâce à l’amour.

Lorsque Lulla vient au monde, sa couleur très noire choque ses parents mulâtres. Son père quitte le foyer et sa mère l’élève sans véritable amour.  Devenue une belle jeune femme, elle a changé de nom et fait carrière dans les cosmétiques. Un jour, elle décide de réparer une faute commise dans son enfance vis-à-vis d’une personne qu’elle a condamnée à la prison dans le seul but de conquérir l’amour de sa mère. Au même moment, sa relation amoureuse vacille. Son amant Booker tente lui aussi d’échapper aux traumatismes de son enfance…

Les chapitres se succèdent rapidement et entremêlent les points de vue narratifs : celui de Lulla, de son amant Booker, de sa mère, de sa meilleure amie, etc. Le style d’écriture de Toni Morrison contient des ingrédients du « réalisme magique » où certains éléments surnaturels mineurs pénètrent dans la réalité familière. Ainsi par exemple, Lulla voit-elle son corps de femme redevenir celui d’un enfant.

Roman bienfaisant ?

Une vie qui débute sans amour ne peut se racheter que grâce à l’amour, non seulement l’amour qu’on reçoit, mais aussi celui qu’on apprend à donner à autrui. C’est en quelque sorte le message de Toni Morrison. Et son récit en est porteur. La plume originale et succincte de l’auteure sonne juste, le déroulement des pensées des divers protagonistes démontre une vision mâture de l’âme humaine. Ce roman, proche du récit initiatique, s’achève sur une note optimiste bienfaisante.

Ci-dessous l’interview de Christine Laferrière qui a traduit le roman en français et nous parle de cet ouvrage …

 

 

UN NOUVEAU SITE VIENT DE NAÎTRE,

IL S’AGIT DU PENDANT ANGLAIS DE LIREPOURGUERIR

« READTOHEAL« 

Le dernier article parle  du roman de Kathryn Stockett « The Help »
qui évoque aussi le racisme noir/blanc dans la société américaine