Archives de Catégorie: Thème de la SOLITUDE

Le thème de la solitude mis en évidence dans une histoire fictive ou réelle

Bandes dessinées pour remonter le moral

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Les gens honnêtes de Durieux et Gibrat

« Les gens honnêtes »

de Christian Durieux et Jean-Pierre Gibrat

(Editions Dupuis, 2014-2016)

Les quatre tomes « Les gens honnêtes » m’ont tout particulièrement touchée, alors qu’habituellement, il faut l’avouer, je ne suis pas très friande de bandes dessinées. La mixité du texte et de l’image n’est pourtant pas pour me déplaire lorsque les personnages et leur démêlés se montrent attachants. Cette situation s’est précisément présentée à moi lors de la lecture de cette BD en quatre tomes.

Sur une note douce-amère, le récit en images nous entraîne dans les pérégrinations d’un quinquagénaire qui vient de perdre son emploi et se voit incapable de remonter la pente, d’autant plus que son épouse l’a quitté. Au fond du trou, il (re)découvre le monde qui l’entoure et puise ses forces dans l’amour et l’amitié. Si le premier tome nous la joue sur une note plus amère que douce, malgré de constantes touches d’humour, les trois autres tomes gagnent en optimisme. Le protagoniste reprend vaille que vaille son destin en main et la vie continue avec ses hauts et ses bas .

Une bande dessinée bienfaisante ?

L’humanité de Philippe, le protagoniste du récit, est au coeur même de ce récit tragi-comique. Le lecteur peut facilement s’identifier à ce personnage qui doit faire face à des problèmes privés et professionnels assez similaires à ceux d’un bon nombre de quinquas : retrouver un emploi après 50 ans, supporter les difficultés rencontrées par ses enfants adolescents, gérer sa propre situation amoureuse, s’occuper de ses parents vieillissants…

Bien entendu, certaines situations peuvent sembler rocambolesques, mais lorsque la dernière page est tournée, nous avons l’impression d’avoir cheminé longtemps avec Philippe au travers de déboires et de moments de bonheur tout à fait réalistes.

L’humour, remède miracle

Les touches d’humour pleuvent tout au long du récit et nous attendrissent sur le miroir des petits et grands tracas du quotidien. Le protagoniste boit aux sources de l’amour et de l’amitié qui lui tendent des perches pour se relever…

Même si ces perches ne sont pas toujours hum hum les plus adéquates ….  🙂 n’est-ce pas ?

Extrait du tome 2 « Les gens honnêtes »

Bande dessinée – littérature ?

La bande dessinée a l’avantage de toucher un large public. Les écrits, plus courts, sont facilement compréhensibles parce que supportés par des images. Textes et images captent plus vite l’attention du lecteur dont les yeux parcourent rapidement la page et s’accrochent facilement sur le fil d’un récit.

Or ces caractéristiques donnent souvent lieu aux préjugés que tente de définir Jacques Dürrenmatt dans son ouvrage « Bande dessinée et littérature » paru aux Editions Classiques Garnier en 2013

Selon l’auteur, les a priori fustigeant la bande dessinée reposent sur quatre points  : 1) ce genre littéraire se lirait trop rapidement 2) les descriptions relèveraient uniquement des images plutôt que du texte 3) le texte serait appauvri au profit d’une surenchère d’onomatopées et de signes expressifs comme les points d’exclamation etc. 4) la bande dessinée serait incapable de retranscrire les émotions des personnages.

Prenons ces points l’un après l’autre au regard de la bande dessinée de Durieux et Gibrat.

Lecture rapide :

Lire rapidement une histoire ne constitue pas vraiment un inconvénient ou un défaut de qualité. Au contraire, savoir qu’il ne faudra pas se concentrer plus de deux heures peut inciter celui qui ne veut pas y accorder trop de temps, à se plonger malgré tout dans le récit.

Quant aux bandes dessinées de Durieux et Gibrat, la lecture d’un ou deux tomes enjolivera facilement toute une soirée et redonnera du baume à l’âme au lecteur épuisé par ses soucis du quotidien.

Descriptions par l’image et non par le texte :

Certes, les images prennent une place très importante dans les bandes dessinées, mais c’est leur agencement qui en font des images vivantes et captivantes et c’est le texte ou l’absence de texte qui les colore et souligne leur qualité descriptive.

Les images des bandes dessinées de Durieux et Gibrat dépeignent avec justesse l’émotion que veut nous communiquer leurs auteurs. Mais c’est avant tout le texte qui nous permet de percevoir l’ampleur de ces émotions.

Texte apprauvri par un trop-plein d’onomatopées et de signes expressifs

La BD recourt à ces moyens d’expression sonore pour éviter les petites formules qui lient les phrases d’un texte que sont par exemple : « il s’écria », « gémit-il », « la voiture vrombit »… Les images constituent le support par lequel les parties du récit sont reliées entre elles. Les sons qui les ponctuent rendent ces images plus réalistes et vivantes.

La bande dessinée se définit comme un heureux mariage entre images et textes. Grâce aux images, le texte n’est pas appauvri, il devient simplement plus minimaliste. Un simple mot suffit à faire rire, ce qui serait plus difficile sans images.

La plupart des bandes dessinées revendiquent cette qualité, celles de Durieux et Gibrat ne font pas exception.

Incapable de retranscrire les émotions des personnages

S’il existe une époque qui se caractérise par une surabondance d’images, c’est bien la nôtre. Les multiples appareils de communication à notre disposition rivalisent de petites icones pour communiquer un sentiment ou une pensée. Les smileys envahissent la majorité de nos courriels pour transmettre en quelques clics l’émotion qui nous submerge. Alors que dire des dessins représentés avec art par les auteurs de bandes dessinées ?

En tous cas, les bandes dessinées de Durieux et Gibrat ne m’ont pas laissée indifférente et le partage d’émotions était bien présent en lisant les quatre tomes.

Conclusion

La bande dessinée constitue un genre littéraire particulier qui traduit des sentiments via ses propres canaux. Tout comme le roman, elle dispose d’atouts pour inviter le lecteur à adopter une perspective différente face à certaines difficultés, voire pour comprendre une situation donnée et/ou se sentir moins seul(e).

Certes, son abord peut apparaître plus aisé que celui d’un roman. Cela n’en fait pas pour autant un genre littéraire de moindre valeur.

En outre, une bande dessinée peut également se présenter comme une lecture bienfaisante, à condition toutefois qu’elle remplisse les mêmes conditions qu’un roman bienfaisant pour le lecteur qui doit pouvoir y trouver les outils nécessaires pour surmonter les aléas de son existence…

Bonnes lectures à toutes et tous !

Tout commence avec un orage….

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Agnès Ledig On regrettera plus tard - roman bienfaisant

« On regrettera plus tard« 

Agnès Ledig

Albin Michel 2016 – Pocket 2017 –  Audiolib 2017

Le destin se sert d’une nuit d’orage pour bouleverser la vie des protagonistes de ce récit. D’un côté, il y a Eric qui voyage avec sa fillette Anna Nina dans une roulotte au gré des chemins et des saisons, fuyant ainsi un passé tragique. D’un autre côté, Valentine, enseignante célibataire, mène une vie très active soutenue par deux fidèles amis, mais elle est incapable de s’attacher amoureusement à un homme sur la durée.

La rencontre inopinée d’Eric et de Valentine les oblige à revoir leurs engagements personnels et à se remettre profondément en question. Les personnages qui gravitent autour d’eux sont empreints d’une sincère bienveillance qui les rend tous attachants.

L’auteur Agnès Ledig est une romancière et sage-femme française qui a pris la plume la première fois en 2005 pour raconter le quotidien de son fils atteint de leucémie. Son écriture comme exutoire à sa douleur deviendra par la suite un baume d’espoir pour les lecteurs en quête de récits bienfaisants.

« On regrettera plus tard » fait partie de ces romans à valeur bienfaisante.

La réalité de chaque protagoniste est décrite avec intelligence et empathie. Les blessures du passé font obstacle au présent et paralysent toute joie future pour celles et ceux qui se laissent envahir par le poids de leur injustice. Or il faut parfois accepter d’être dérangé ou bousculé dans sa douleur pour dissiper le voile et entrevoir un avenir plus heureux.

Je vous invite à écouter Agnès Ledig qui parle de son roman et de l’espoir qu’elle souhaite y distiller. Pari gagné !

 

La grande littérature peut-elle aider à renouer des liens brisés ? « La poupée de Kafka » de Fabrice Colin

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La poupée de Kafka de Fabrice Colin

« La poupée de Kafka » de Fabrice Colin

Editions Actes Sud, 2016

L’écrivain français Fabrice Colin a eu l’idée géniale de baser l’histoire de son roman sur une énigme littéraire autour de Franz Kafka. L’anecdote fut relatée par Dora Diamant, la dernière compagne de Kafka, mais jusqu’à présent, aucune preuve matérielle n’a pu étayer ses dires.

Grand écrivain tchèque de langue allemande et de confession juive, Kafka (1883-1924) aurait écrit durant l’automne 1923 à Berlin des lettres pour consoler une fillette désespérée d’avoir perdu sa poupée. Quotidiennement pendant trois semaines, il lui aurait remis des missives qu’il écrivait au nom de cette fameuse poupée. Grâce aux lettres, la peine de la petite fille était apaisée, car la poupée lui assurait qu’elle l’aimait toujours, bien qu’elle ait choisi de voyager pour explorer le monde et finalement convoler en justes noces .

Dans le roman de Fabrice Colin , la protagoniste Julie Spieler entretient des relations chaotiques avec son père, professeur de littérature allemande et adorateur d’un écrivain qui a pris une place trop importante au sein de la famille, cet écrivain étant bien entendu Kafka. La jeune femme a pourtant subi l’influence paternelle et se met à la recherche de l’énigmatique fillette à la poupée. Toujours vivante, celle-ci se débat avec des souvenirs qui la hantent et qui remontent au temps de la Shoah durant la seconde guerre mondiale.

Franz Kafka

De même que les mots des lettres écrites par Kafka auraient soulagé la tristesse d’une fillette au début du siècle dernier, de même la littérature et la figure emblématique de ce grand écrivain ont rétabli dans cette histoire contemporaine des liens tendus et brisés entre une jeune fille et son père, ainsi qu’entre une vieille dame et ses fantômes du passé.

C’est autour de ces trois histoires qu’évolue la narration de ce récit habilement menée par la plume de l’auteur.

Kafka, aussi désigné dans le récit comme le  « Célibataire » et qui avait exploité le thème de la solitude dans ses écrits, devient par le biais de son oeuvre littéraire la figure qui rétablira les liens brisés entre les individus.

Vous trouverez si vous le souhaitez une analyse intelligente et fouillée de ce roman  en suivant ici le lien du blog littéraire d’Emmanuelle Caminade.

Histoire bienfaisante ?

Très belle histoire où se mélangent réalité et rêve, horreur et humour et qui se lit facilement tout en éveillant l’envie de se replonger dans les écrits de Franz Kafka. Ce récit pointe le doigt sur les difficultés de communiquer au sein d’une famille et de surmonter ses démons. Si l’être humain reste par définition limité par sa finitude et sa solitude, il doit faire en sorte de jeter le plus de ponts possibles entre lui et les autres.

Et devinez quel est le pont le plus efficace mis en valeur par Franz Kafka et Fabrice Colin  ? …. la L I T T E R A T U R E

Un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous. - Franz Kafka

Ecrit en 1948, « 1984 » de George Orwell … toujours d’actualité en 2015

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« 1984 » de George Orwell

en format livre(438 pages)

…. ou

en format audio (15 heures d’écoute)

Personnellement, j’en ai écouté une partie et j’en ai lu une autre …. parce que totalement immergée dans ce roman phare, je ne pouvais attendre d’être de nouveau assise au volant de ma voiture pour connaître la suite de l’histoire. Il a fallu que le soir venu, je retrouve le livre papier pour dévorer quelques chapitres supplémentaires.

Nul doute que beaucoup d’entre vous ont déjà lu ce grand classique, et tout particulièrement au cours de vos années scolaires. Je vous conseille de vous plonger ou de vous replonger dans cette lecture qui est toujours d’actualité parce qu’elle met en évidence les dérives du totalitarisme et l’annihilation de tout esprit de liberté et d’individualité qui est le propre de l’être humain.

BIG BROTHER  File:1984-Big-Brother.jpg personnage symbolique du roman de George Orwell est devenu une sorte de métaphore utilisée dans le langage courant –  peut-être plus que jamais aujourd’hui – pour dénoncer toute atteinte à la vie privée.

Dans « 1984 » Big Brother incarne le chef d’un parti auquel la population est soumise en actes et en pensées, y compris Winston Smith, notre personnage principal dont on suit l’évolution des pensées et des doutes quant à la valeur de cet état policier tout-puissant.

Un roman bienfaisant ?

oui  parce qu’il permet de s’évader dans un ailleurs qui – heureusement – est chez nous encore différent de notre quotidien

oui parce qu’il permet de relativiser nos soucis : nos pensées ne sont pas encore surveillées, nous avons le choix de ne pas exposer notre vie privée …à condition de ne pas nous compromettre sur  les réseaux sociaux

oui parce que ce roman fait réfléchir et nous permet peut-être aussi d’agir pour préserver notre liberté de penser

et pour finir je vous laisse écouter George Orwell lui-même, un visionnaire ?

« Le Vieil Homme et la Mer » de Ernest Hemingway

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« Le vieil homme et la mer » de Ernest Hemingway

Un court roman classique  pour illustrer le thème de la vieillesse, une ode initiatique où l’homme doit affronter les forces de la nature avec humilité. Bien que celles-ci se montrent plus fortes, le vieil homme gagne en dignité et en respect au vu de la condition humaine qu’il incarne.

Il s’agit du récit d’un pauvre et vieux pêcheur cubain, Santiago, qui ne parvient plus à ramener du poisson avec sa barque. Manolin, un jeune garçon, s’occupe de lui et continue de croire en la bonne étoile de celui qui lui a appris à pêcher. Un jour, Santiago attrape un énorme poisson qui l’entraîne au large sur son petit bateau. Pendant trois jours et deux nuits, Santiago, épuisé et affamé, suit le poisson et finit par le tuer. Après l’avoir attaché à son bateau, il repart vers la côte, mais les requins ont flairé la trace du sang qui s’échappe du cadavre de l’animal et  s’emparent petit à petit de sa chair ….

Ce roman est paru pour la première fois en 1952 sous le titre original anglais « The Old Man and the Sea ». Il a valu à son auteur Ernest Hemingway d’obtenir le prix Pulitzer en 1953 et le prix Nobel de littérature en 1954.

Un roman bienfaisant ? Bien sûr !

Ce récit fait l’apologie de la ténacité, du dépassement de soi, mais aussi de l’amitié, de la bienveillance à l’égard de la nature.

Il évoque bien sûr la vieillesse et la solitude qui l’accompagne.

On ne devrait jamais rester seul quand on est vieux, pensa-t-il. Mais c’est inévitable.

La vieillesse fait référence à la faiblesse humaine qui ne fait pas le poids devant le déchaînement des forces de la nature…

Tout en lui était vieux, sauf son regard, qui était gai et brave, et qui avait la couleur de la mer.

Mais le vieil homme fait preuve de courage et de dignité dans les difficultés, et en cela, il mérite tous les honneurs.

Mais l’homme n’est pas fait pour la défaite, dit-il. L’homme peut être détruit, mais pas vaincu.

En outre, il démontre beaucoup de sagesse, de bienveillance envers la nature.

Le poisson aussi est mon ami, dit-il tout haut.J’ai jamais vu un poisson pareil , j’ai jamais entendu parler d’un poisson comme ça, pourtant faut que je le tue. Heureusement qu’on n’est pas obligé de tuer les étoiles.

C’est un roman qui mérite qu’on le lise ou le relise parce qu’avec de simples mots, il décrit l’être humain et ce qu’il représente de plus beau, ce qui lui donne ses lettres de noblesse, à savoir sa capacité à espérer et à ressortir vainqueur même dans la défaite…

Je ne résiste pas à l’envie d’ajouter ci-après la bande-annonce d’un très beau film d’animation (2001) sur « Le Vieil Homme et la Mer » :

 

« CENT ANS DE SOLITUDE » de Gabriel Garcia Marquez

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« CENT ANS DE SOLITUDE » de Gabriel Garcia Marquez

Publié en langue espagnole en 1967, ce volumineux roman latino-américain figure au palmarès des chefs-d’oeuvre de la littérature universelle.

L’écrivain colombien Gabriel Garcia Marquez y relate l’histoire de la famille Buendia sur sept générations au sein d’un village imaginaire, Macondo. Celui-ci est décrit comme se situant dans les Caraïbes colombiennes, une région bien connue par l’auteur.

La famille Buendia traverse des événements qui ont marqué l’histoire de la Colombie entre la moitié du 19ème siècle et la moitié du 20ème siècle (guerres civiles, bouleversements économiques et sociaux). Toutefois le récit de cette famille, ainsi que celui de leur village s’accompagne de phénomènes fantastiques et imaginaires qui habitent de façon naturelle le quotidien  : fantômes du passé, personnages qui dépassent les cent ans d’âge, inventions magiques, maladies invraisemblables, lévitations, malédiction etc.

Cette approche à la fois singulière et esthétique de la réalité caractérise un nouveau genre littéraire, le « réalisme magique »  dont l’oeuvre de Gabriel Garcia Marquez est devenue l’un des fers de lance.

Thème de la solitude :

La famille Buendia est frappée par une malédiction qui la condamne à cent ans de solitude… la propension à la solitude qui caractérise les membres de cette famille est évidente et la plume de l’auteur ne cesse de nous le rappeler…

« …le seul trait commun qu’ils conservèrent fut cet air de solitude qu’ils tenaient de famille.« 

Le caractère cyclique et répétitif qui imprègne toute l’histoire ( l’un des signes les plus visibles étant la répétition continuelle des mêmes prénoms de génération en génération) confère au récit cette impression d’irréversibilité de l’existence humaine marquée par la solitude des êtres et leur propension à toujours renouveler les mêmes erreurs.

Est-ce à dire que ce roman nous révèle la plus grande tragédie de l’homme, à savoir le fait qu’il poursuit toujours son existence dans la solitude, entouré par d’autres solitudes ?

 Roman classique bienfaisant ?

J’avoue avoir eu un peu de mal à entrer dans cette histoire, même si les mérites d’écriture et d’originalité me paraissent évidents. Au départ, il me semblait difficile de s’identifier aux protagonistes pour finalement s’attacher à leur sort. Et puis tout doucement, j’ai laissé tomber mes premières résistances et je me suis véritablement laissée happer par cette plume originale qui guide le lecteur au coeur de la comédie humaine telle que Gabriel Garcia Marquez a voulu nous la décrire.

Alors oui, il s’agit d’un roman bienfaisant, car il aborde le thème de l’humain dans sa quintessence, c’est-à-dire au coeur même de sa solitude parmi les siens. Et finalement, il semble que seul l’amour puisse l’aider à fuir ce sentiment et peut-être l’en délivrer….

Pour les âmes esseulées, direction « L’ATELIER DES MIRACLES » de Valérie Tong Cuong

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« L’atelier des miracles » de Valérie Tong Cuong

Avec sa banderole « Prix de l’optimisme », ce roman a tout de suite attiré mon attention…

Dans cette histoire, nous suivons le parcours de trois personnes issues de mondes différents, mais qui subissent au même moment des expériences traumatisantes : Mariette, professeur harcelée par ses élèves et par son mari, Millie, rongée par un passé qu’elle tente d’effacer de sa mémoire, Mike, ex-militaire devenu SDF. Ces trois protagonistes font la rencontre d’un homme providentiel, Jean, directeur d’une maison d’accueil dont l’objectif est de remettre sur pied les gens perdus comme eux, les âmes esseulées…

« Mais nous avons tous besoin d’un cercle, même restreint, c’est humain. Savez-vous que les gens seuls meurent plus tôt ? Ils meurent de ne pas avoir d’échange. Ils meurent de ne rien dire. Ils ne demandent rien, on ne leur donne rien, alors ils meurent – et on est impuissant. »

Bien que cet atelier des miracles leur apporte réconfort et soutien pendant un certain temps et constitue un tremplin évident pour leur futur, il s’avère vite que la perfection n’y est pas au rendez-vous. Jean le bienfaiteur, lui-même, cache ses failles et ses blessures… Dès lors, il deviendra de plus en plus évident pour les trois rescapés qu’il leur faut apprendre à trouver en eux-mêmes l’énergie vitale et la force de se reconstruire. Malgré tout, l’atelier des miracles leur aura appris une chose essentielle qu’ils pourront apprécier à sa juste valeur :  « l’entraide ».

Un livre qui fait du bien  ?

Ce roman mérite le prix de l’optimisme qui lui a été attribué. En évoquant des destinées aussi différentes que celle d’un SDF ou d’une bourgeoise, le récit montre que toute vie est parsemée d’embûches. Toutefois, la rencontre entre les gens, l’entraide, l’empathie, mais aussi l’énergie nécessaire pour s’accepter soi-même et affronter les défis du quotidien constituent les ingrédients principaux pour atteindre le bonheur. L’atelier des miracles se définit comme une sorte de cheminement vers cette reconnaissance de soi et cette ouverture à autrui, même si le prix à payer est parfois élevé.

IMAGINATION = UNE ARME POUR ou CONTRE L’ENFER ?

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« La demoiselle des Tic-Tac » de Nathalie Hug

Ce roman fait partie de la sélection du mois d’avril pour le jury du Prix des Lecteurs du Livre de Poche, section littérature.

Face au sombre, mais combien remarquable  « Yellow Birds », je me doutais que ce court récit ne remporterait pas la victoire ce mois-ci. En effet, le roman de Kevin Powers (qui relate le retour au pays d’un jeune soldat américain après l’horreur des combats en Irak), bouleverse et dérange à un tel point que j’ai dû me changer les idées pour ne pas y repenser continuellement.

Pourtant j’ai préféré donner mon vote à « La demoiselle des Tic-Tac » pour plusieurs raisons :

– d’abord parce que le roman parle d’une région qui m’est proche, la Lorraine française, où la seconde guerre mondiale s’est déroulée au milieu d’une population ayant fait les frais d’annexions successives durant les décennies précédentes

– ensuite parce que cette période est racontée au travers du regard d’une enfant, témoin des paradoxes et des conflits de son époque et dont la mère est une adepte de Hitler

– finalement parce que, loin d’être une histoire drôle, elle laisse toutefois la place à une lueur d’espoir en l’humanité

Récit court, mais éducatif sur le plan historique, l’histoire racontée par une enfant touche le lecteur, car on y retrouve un certain sang-froid, celui des êtres innocents cherchant à comprendre avec leur propre raisonnement l’horreur qui les entoure. Ce roman témoigne aussi du pouvoir indestructible de l’esprit, source d’espoir, de réconfort dans des moments où emprisonné sous les décombres, un être ne peut s’échapper que grâce au pouvoir de son imagination.

Cette arme, que nous possédons tous et qui est l’imagination, nous en retrouvons également l’influence dans le troisième roman de la sélection du mois d’avril, à savoir  « Swamplandia » de Karen Russell. Ici la narratrice, une jeune adolescente et sa soeur cadette, s’élancent séparément dans les immenses étendues marécageuses de Floride. Pour éviter que la solitude ne les assaille, elles ont recours, chacune à sa manière, aux délires de leur imagination. Un beau récit original qui promène le lecteur au coeur des marais où foisonnent une faune et une flore pas toujours accueillante.

Pourquoi faire mention de ces titres dans ce blog de bibliothérapie ?

Je ne peux pas vraiment dire que ces titres procurent bien-être, apaisement et réconcilient avec le genre humain. Non. Pourtant chacun d’entre eux, et tout particulièrement « La demoiselle des Tic-Tac » met en valeur le pouvoir de l’imagination, fruit de notre esprit, qui vagabonde et permet de prendre prise sur quelque chose, comme  un souvenir, pour surmonter des épreuves inhumaines. Pourtant cette arme est à double tranchant et peut s’avérer néfaste lorsque l’on perd totalement pied avec la réalité comme dans « Swamplandia », ou comme dans « Yellow Birds ».

Je voulais donc simplement ici ouvrir une réflexion sur cette arme que l’on appelle l’esprit ou l’imagination, une arme qui trouve également un bon support dans la littérature, les romans, les histoires…

 

 En cliquant sur PDL 2014 COMMENTAIRES AVRIL LITTERATURE vous trouverez les critiques des jurés qui ont été retenues par le service commercial des éditions du Livre de Poche. Ma critique se trouve en troisième position (Nathalie, Bonnert) dans la rubrique correspondant à « La demoiselle des tic-tac ».

 

 

J’en profite pour attirer votre attention sur l’ajout récemment effectué sur la page d’accueil de ce blog. Tout blogueur a maintenant l’opportunité de faire un peu de publicité pour son site ou son blog, voire même pour ses vidéos, en y insérant un lien vers un article sur la chronique d’un roman bienfaisant, voire sur vers un article répondant aux trois questions soulevées.

En guise d’échange, je vous demande seulement de mentionner dans cet article/cette vidéo le lien vers http://www.lirepourguerir.com.

 

SOLITUDE DANS LA LUMIERE ET DANS L’OMBRE : « Le problème Spinoza » de Irvin Yalom

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« Le Problème Spinoza » de Irvin Yalom.

Voici le roman qui a remporté le plus de votes parmi les jurés du prix des lecteurs pour Le Livre de Poche au cours du mois de mars dernier.

En cliquant sur Avis sur Le problème Spinoza , vous trouverez les critiques des jurés qui ont été retenues par le service commercial des éditions du Livre de Poche. Ma critique se trouve en quatrième position (Nathalie, Bonnert).

Je suis fière et heureuse d’avoir voté pour ce livre qui non seulement m’a divertie tout au long de ses presque 550 pages, mais m’a aussi appris pas mal de choses sur les pensées de Baruch Spinoza, un philosophe du 17ème siècle dont la plupart de nos contemporains connaissent peu de choses si ce n’est sa renommée dans le domaine de l’érudition et de la philosophie.

Et pourtant Spinoza, juif excommunié, était un penseur que j’aimerais caractériser d’avant-gardiste,…. quoique le terme « avant-gardiste » fait en général référence à une ouverture d’esprit moderne. On regrette toutefois les lacunes de notre époque en matière de tolérance et d’ouverture d’esprit… fait-elle réellement preuve d’une plus grande largesse d’esprit que par le passé ???….

Disons plutôt que Spinoza était un penseur  lumineux, ouvert à une pensée tolérante et non limitée par les dogmes et les traditions. Bien sûr, au 17ème siècle, ces réflexions étaient condamnées et condamnables. Question : le seraient-elles encore aujourd’hui, à notre époque ????

La tolérance est une vertu lumineuse, mais qui hélas isole, même de nos jours…. Spinoza en a fait les frais car il fut mis au ban de sa communauté juive. Il révéla  peu de choses sur sa vie privée. Dans ce roman, Irvin Yalom tente de la reconstruire autour d’une fiction en se basant sur ses écrits et ses pensées.

« Dites moi, croyez vous en un Dieu tout-puissant?….En un Dieu parfait? Qui se suffit à lui même ?… Alors vous en conviendrez , par définition un être parfait qui se suffit à lui même n’a pas besoins, ni d’insuffisances, ni de souhaits , ni de volontés. Alors, poursuit Spinoza, je suggère qu’il n’y a pas de volonté de Dieu en ce qui concerne le comment, ni même le pourquoi le glorifier. Donc permettez moi d’aimer Dieu à ma façon. »

Mais l’auteur pousse la fiction à un degré d’excellence en alternant les chapitres sur la vie de Spinoza avec ceux qui décrivent les tourments et les pensées d’un idéologue nazi ténébreux, Alfred Rosenberg. Celui-ci se confie à un psychologue fictif et ses confidences ont tôt fait de nous révéler les méandres d’une âme sombre et esseulée qui voulait surtout s’attacher les faveurs d’Hitler.

Pourquoi ce face à face anachronique entre ces deux personnages ? Le coup de génie de Yalom est de rassembler dans un seul roman ces deux êtres totalement opposés : l’être lumineux qu’était Spinoza et l’être ténébreux qu’était Rosenberg. Le lien vient de la fascination que ce dernier portait à Spinoza,  un Juif excommunié dont Goethe, l’une de ses idoles, faisait l’éloge.

Un livre qui fait du bien ? Oui, car nous sommes ici face à deux cas de solitude. Toutefois, nous constatons par cette lecture que la solitude dans la lumière est plus apaisante et plus réconfortante que la solitude qui vient du mal. Les gens biens qui ont peut-être été rejetés par la société resteront dans la mémoire de l’humanité comme des exemples à suivre….

SOLITUDE et DETRESSE FAMILIALE : « Du domaine des murmures » de Carole Martinez

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« Du domaine des Murmures » de Carole Martinez paru en format poche chez folio

Dans ce conte à la fois mystique et sensuel, une très jeune femme du 12ème siècle nous relate l’incroyable chemin qu’elle a décidé de suivre dans un monde où la femme a rarement voix au chapitre.

Le jour de son mariage, elle refuse de dire oui au fiancé qu’on lui a imposé et elle implore devant une foule scandalisée qu’on lui permette d’offrir sa vie à Dieu. Elle veut vivre comme une recluse jusqu’à sa mort dans une cellule attenante à la chapelle du château de son père. Seule, emmurée, délaissée par son père meurtri, elle participera de près et de loin à la vie qui se déroule autour d’elle.  Mais elle est loin de se douter que la vie la rattrapera d’une façon surprenante…

C’est avec un mélange de suspense et de plaisir de lecture que l’on suit les pensées d’Esclarmonde qui nous dévoilent la psychologie de son siècle. Carole Martinez nous laisse entrevoir la cruauté d’une époque moyenâgeuse où  les croisades étaient à l’honneur, où les voix de Dieu et du diable se partageaient le destin des hommes et où les contes et les légendes donnaient corps à l’angoisse existentielle tout en nourrissant les âmes.

« Le monde en mon temps était poreux, pénétrable au merveilleux. Vous avez coupé les voies, réduit les fables à rien, niant ce qui vous échappait, oubliant la force des vieux récits. Vous avez étouffé la magie, le spirituel et la contemplation dans le vacarme de vos villes, et rares sont ceux qui, prenant le temps de tendre l’oreille, peuvent encore entendre le murmure des temps anciens ou le bruit du vent dans les branches. Mais n’imaginez pas que ce massacre des contes a chassé la peur! Non, vous tremblez toujours sans même savoir pourquoi. »

Un livre qui parle de solitude, choisie ou non…

Un roman qui parle de l’amour filial blessé…

Mais aussi un roman qui  met à l’honneur la force du merveilleux dans nos vies…